Et c'est là que tout commence... (PV Tori et.... x3 )

Une autre journée se terminait... S'ils étaient restés en Angleterre, ils seraient pas loin d'être le matin, mais Marco s'était finalement habitué au décalage horaire. Pour Tori ça signifiait revenir aux heures auxquelles elle était habituée toute sa vie. Pour Shimmer... Elle restait toujours bien active après le coucher du soleil, peu importait dans quel fuseau horaire ils se trouvaient. Leur petite avait pas mal la taille d'un melon d'eau et son terme approchait à grand pas. La nervosité était palpable et plus souvent qu'autrement Marco avait du mal à dormir la nuit, il voulait rester à l'affut du moindre signe de contraction et gardait le téléphone à portée de main sur la table de chevet. Il avait un mélange de hâte et de peur. Il voulait que tout se passe bien, il avait peur que Tori souffre ou des possibles complications... Non, Archie avait dit que tout avait l'air normal. D'ailleurs, le gentil docteur avait plié et avait fait ses bagages avec sa famille pour voir le Québec. Il résidait à un hotel en ville. Quant à Tori et Marco, ils s'étaient déniché un petit loyer dans le quartier non loin de celui des parents de sa femme. Il préférait justement avoir leur appartement à eux, considérant le pouvoir de Katheryne et avoir leur intimité. La relation avec John restait... restait ce qu'elle était. Ils n'avaient pas vraiment eu de discutions depuis l'annonce de la grossesse de Tori ni aucun moments après. C'était un climat froid entre lui et monsieur Clark, mais au moins ils n'étaient pas en conflit ouvert.

Considérant qu'Archie ne pratiquait plus officiellement la médecine, et encore moins au Québec, ils avaient convenus qu'il se rendrait sur place au moment du travail.Alors il n'y avait plus grand chose à faire qu'attendre... Attendre, regarder le cadran, se coller sur Tori, sentir que Shimmer arrêtait enfin de pratiquer son kick-boxing, puis finalement avoir les yeux qui se ferment, plus par brûlure physique que vraie fatigue mentale. Et le cycle recommençait ainsi.

C'était difficile de dormir. D'habitude, il me semble que peu importe l'endroit où je me trouve, que ce soit dans mon lit, dans un lit d'hôtel, dans le lit d'une chambre d'ami, sur un canapé, sur un matelas gonflable ou même sur le plancher, j'arrive à m'endormir facilement ou du moins, bon je ne m'endors pas rapidement, mais je ne m'endors pas plus rapidement à un endroit qu'à un autre, bref, mais diable que c'est compliqué dans ce loft ! J'ai l'impression que le matelas est trop ferme et que l'oreiller est trop mou. C'est même limite si je me rendrais compte de quelque chose si quelqu'un retirait ce dernier. Du coup, ce soir, j'ai trouvé le confort en m'appuyant davantage sur le bras de Marco que sur l'oreiller. Que dis-je, " en m'appuyant " ? En l'envahissant, oui ! Le pauvre, je ne sais même pas si je l'empêche de dormir... Me le dirait-il si je lui faisais mal ?...

Si je parlais de ça, certains pourraient dire " Oui, mais c'est normal que t'arrives pas à dormir. C'est pas le lit qui est le problème, c'est que tu sens le bébé bouger ! " Alors, non, ce n'est pas ça et je suis bien catégorique là-dessus. Je dirais même qu'au contraire, me concentrer sur les mouvements m'aide à m'endormir. C'est comme ça depuis toujours, parce que du plus loin que je me souvienne, c'était pareil lors des trajets en voiture ou en avion. Plus le véhicule se déplaçait sans interruption, plus les vibrations m'endormaient et c'était parfait, je récupérais les heures de sommeil qui me manquaient à cause d'une nuit passée à lire un roman trop intéressant pour que je le lâche. Chaque fois qu'on se dit que c'est la dernière page, ça ne l'est jamais vraiment...

Donc, pour m'aider à m'endormir, je me suis mise à tenir un discours mental adressé à Shimmer, comme je le fais parfois depuis quelques temps. J'espère que ce n'est pas en train de devenir une habitude ou je risque d'être dépitée après sa naissance.

Ma pauvre, tu dois avoir chaud à l'intérieur. Ça va faire un méchant gros contraste en sortant. Heureusement que c'est pas l'hiver, mais quand même, les nuits peuvent être fraîches ici l'été. L'air climatisé aussi ça peut être vraiment froid, mais ça d- oh un autre coup de pied ? Dis donc, on a une future championne olympique de judo par ici ! À moins que tu préfères le karaté ? Mais ce n'est même pas encore une discipline olympique. Remarque, ça aura le temps de le devenir, parce que pour l'instant, tu es encore bien petite. Il faudrait déjà que tu commences par sortir et après, on verra ! Qui sait ?... Bon, tu trouves peut-être que je parle beaucoup, mais je suis une intellelec- uh. Cette fois-ci, ce n'était pas un coup de pied. C'était plutôt comme une grosse contraction. Sur le coup, j'ouvre les yeux et attends... ... Puis après un moment, une autre. T'as pris mes informations au sérieux, toi, hein ? Je finis par me redresser dans le lit et attendre que, je ne sais pas, soit que ça se calme, soit que ça s'intensifie.

Marco ne savait pas quelle heure il allait être quand il allait ouvrir les yeux. Allait-il voir qu'il était 8h00 du matin après avoir dormi sans avoir eu l'impression de se reposer ou allait-il être encore 2h00 ou 3h00. Il ne savait pas quelle option était la meilleure. Il savait en tout cas que l'éclairage n'avait pas changé. Il ramena les couvertures par dessus sa tête, comme si ça allait faire magiquement comme avec Jake, lui faire comprendre que c'était l'heure du dodo et qu'il allait s'endormir directement. Après un moment, il redescendit la couverture. Déjà il ne faisait pas froid et il étouffait sous la couverture... Aussi, il avait l'impression qu'il manquait quelque chose. Tori s'était levée pour aller aux toilettes? Roulant sur le côté, il voyait sa forme floue et ses yeux brillants qui l'étaient tout autant. Ah... Elle était réveillée.

- Tori?...

Il chercha à tâtons ses lunettes carrés sur sa commode. Les retrouvant, et accrochant au passage le téléphone, il les posa sur son nez. Bon, il allait se pencher pour ramasser le fameux téléphone, au moins ce dernier n'était pas trop loin. Et les batteries n'étaient pas parties valser à deux coins différents de la pièce comme c'était déjà arrivé.

Se redressant, il vit l'heure dans son champ de vision 2h15... Retirant ses lunettes légèrement pour se frotter les yeux, il se dit que s'il n'arrivait pas à dormir maintenant, il ne dormirait pas de la nuit. D'ailleurs, il reporta son attention vers sa femme.

- Tu n'arrives pas à dormir non plus?

Sa voix ne trahisait pas de trace de sommeil. Il avait fermé les yeux, mais il n'avait pas du tout sombré dans les bras de Morphée. Visiblement ce n'était pas non plus le cas de Tori.

Je n'ai pas l'impression que ça se calme. J'observe la pièce dans la pénombre et regarde avec attention la silhouette des objets et des quelques meubles qui se découpent dans l'obscurité. Je m'adonne à cette contemplation jusqu'à ce que je sente du mouvement, non pas à l'intérieur, mais à côté de moi, pour faire changement. Ce mouvement est suivi de près par une voix interrogative :

- Tori?...

- Mmoui ?

Je voulais me tourner doucement vers mon amoureux, mais le bruit du téléphone qui tombe pile au moment où je sens une contraction me fait sursauter et je me retourne un peu brusquement dans la direction de Marco qui se penche pour ramasser l'appareil, puis qui se redresse.

- Tu n'arrives pas à dormir non plus?

J'hésite un peu sur la réponse. Oui, je n'arrive pas à dormir, mais ce n'est pas juste que je ne trouve pas le sommeil... Bon, de toute façon, peu importe la façon dont je le formule, il va soit paniquer, soit rester alerte pour le reste de la nuit, alors... Pour la peine, je cherche sa main dans l'obscurité et mets la mienne par-dessus. Je ne sais pas s'il s'agit d'une simple impression, mais je sens que sa main est plus chaude que la mienne.

- Oui, mais non... C'est à dire que... uh... Bon, je voudrais vraiment que tu restes calme et que tu ne paniques pas, mais, voilà, ce sont les contractions... Je ne sais pas si elles s'intensifient, alors dans le doute, j'attends. Je ne sais pas vraiment quoi faire d'autre.

Marco sentit Tori prendre sa main, l'air hésitante, faisant sauter un battement à son coeur. Par réflexe il serra sa main, essayant bien sûr de ne pas lui faire mal. Il voyait les jours passer et il savait que le grand jour approchait pas à pas. Était-ce maintenant? Une fausse alerte? Ah zut, il se sentait déjà avoir des sueurs froides! Merde, il avait pourtant suivit des cours prénatals---Reformulation, il avait accompagné Tori à ses cours. Elle semblait toujours zen et les explications semblaient juste passer normalement. Pour Marco, on aurait dit que c'était lui qui allait accoucher et on lui avait même demandé une fois s'il avait besoin de sortir prendre l'air, il était apparement d'une pâleur inquiétante.

Il se plaqua la main sur le visage, essayant de ne pas s'attarder sur ce souvenir. Il allait devoir être plus fort que ça pour quand le moment allait vraiment venir.

- Oui, mais non... C'est à dire que... uh... Bon, je voudrais vraiment que tu restes calme et que tu ne paniques pas, mais, voilà, ce sont les contractions... Je ne sais pas si elles s'intensifient, alors dans le doute, j'attends. Je ne sais pas vraiment quoi faire d'autre.

Pourquoi quand il entendait les mots ''reste calme'', son corps faisait exactement le contraire?! Surtout, ce fut le mot contraction qui fit sonner une alarme dans sa tête.

- Ça en fait combien? Tu as mal? Je peux faire quelque chose... Je peux appeller Archie si tu veux! Tu crois que c'est---

STOP.

Marco se mit à prendre de bonnes inspirations, un peu comme la dame avait instruit à Tori dans ses cours. Se sentant complètement ridicule, il essaya de faire le brave en lui disant.

- F-Fais comme moi, respire!

Et bien entendu, son niveau de crédibilité était pratiquement nul. Tori allait visiblement bien, enfin, elle n'était pas encore incommodée par les sensations que son corps pouvait lui donner, du moins si c'était le cas, ça ne paraissait pas. Si ça continuait, c'était lui qui allait la rendre nerveuse ou si c'était elle qui le rassurait alors que c'était elle qui souffrait, ça allait paraître mal.

- Pardon, ça va aller... Ça va aller...

Disait-il ça à Tori ou à lui-même? Ou à leur petite qui décidait ou non de faire son entrée? Il tenait toujours la main de Tori, jetant un coup d'oeil en coin au téléphone.

Eh oui, j'aurais voulu que l'atmosphère reste détendue autant qu'elle pouvait l'être, mais après quelques années de vie commune, je connais bien mon chéri, ce n'est pas de sa faute. Il y a presque un chronomètre mental qui se met en marche pour calculer le temps que ça lui prendra avant de réagir.

- Ça en fait combien? Tu as mal? Je peux faire quelque chose... Je peux appeller Archie si tu veux! Tu crois que c'est---

- Euh- ben-- Je-...

Non, ça ne sert à rien d'essayer de répondre pour l'instant. De son côté, Marco ne termine même pas sa question que je l'entends déjà prendre de profondes inspirations.

- F-Fais comme moi, respire!

J'ai soudainement vraiment envie de rire à cause de sa réaction disproportionnée, mais je me retiens. Je ne sais pas si m'entendre rire pourrait lui permettre d'évacuer le stress ou si, au contraire, il risque de paniquer encore plus en croyant qu'une douleur terrible est en train de me rendre hystérique... Vaut peut-être mieux pas le savoir, mais pour l'instant, j'ai une chance de répondre sur un ton calme...

- Je ne sais pas exactement combien... Et ce n'est pas la chose la plus agréable qui soit, mais ce n'est pas non plus de la torture, alors détends-toi.

Je défais l'étreinte de sa main et la passe dans son dos pour l'aider.

- Pardon, ça va aller... Ça va aller...

J'hoche la tête et réponds :

- Oui, ça va aller...

Puis, une envie me prend. Une envie... complètement démoniaque. Ce genre de situation n'arrive pas tous les jours et lorsque les femmes parlent de leur(s) accouchement(s), c'est souvent bien banal. Il n'y a pas vraiment de détails amusant à raconter, alors j'ai envie de faire exception, mais c'est vraiment cruel de ma part. Non, Tori, ne fais pas ça, ne fais pas ça, ne le fais pas !

- Ça va aller. Ça va bien all... Agh, non, non, ça ne va pas, je... Urghh qu'est-ce qui se passe ?! Ça fait mal, est-ce que je suis en train de mourir ?!

En faisant semblant de paniquer et de souffrir, je porte mes mains à mon ventre comme si je voulais l'empêcher d'exploser, allant même jusqu'à me recoucher. Je continue encore quelques secondes, puis j'éclate de rire et me redresse avec un peu de difficulté.

- HAHAHAHA, Pardon, haha ! Pardon ! C'était vraiment tentant. Je suis hahaha je suis désolée !

- Je ne sais pas exactement combien... Et ce n'est pas la chose la plus agréable qui soit, mais ce n'est pas non plus de la torture, alors détends-toi.

Et voilà, c'était la situation qu'il aurait voulu éviter, enfin par question d'ego mal placée qu'autre chose. Il ne se faisait pas d'illusions, ce n'était pas lui qui allait garder la tête froide et être le héros sans peur veillant sur sa femme apeurée. Il n'était pas le chevalier servant qu'il aurait voulu être, il espérait ne pas décevoir sa bien-aimée. C'était elle qui avait besoin d'attention, pas lui. Et pourtant, il répétait avec elle les mêmes mots. Ils perdaient sans doute leur sens à répétition, mais ça faisait quelque chose à dire.

- Ça va aller... Ça va aller, continua-t-il de dire.

Tori hochait la tête.


- Ça va aller. Ça va bien all... Agh, non, non, ça ne va pas, je--

- Tori?!!?

Ah non c'était sérieux, elle se retrouva étendue, se tenant le ventre et se tordant de douleur. Oh non, oh non!

- ... Urghh qu'est-ce qui se passe ?! Ça fait mal, est-ce que je suis en train de mourir ?!

- Tu ne mourras pas Tori! Jamais, je vais appeller Archie, tiens bon, respire, ça va aller!

Et pendant qu'il essayait de garder son calme, et échouait misérablement, il réalisait qu'il n'avait toujours pas pris le téléphone! Et s'il appelait l'ambulance?! Que faire, que...

Des rires. Tori riait. Était-ce la douleur qui lui faisait perdre la tête ou...

- HAHAHAHA, Pardon, haha ! Pardon ! C'était vraiment tentant. Je suis hahaha je suis désolée !

- Oh... OH.

Il avait l'impression d'avoir prit une douche froide, il se sentait trembler. Sans prévenir, il se jeta presque sur Tori pour la serrer dans ses bras, ses lèvres allant directement sur les siennes.

- Ne refais plus ça!

Il l'embrassa à nouveau.

- Plus jamais.

Et il l'embrassa encore. Le soulagement prédominait sur la situation. Elle essayait sans doute de détendre l'atmosphère. Il s'écarta enfin pour reprendre son souffle et se calmer pour de bon. Posant sa main sur le ventre proéminant, il le caressa un peu.

- Shimmer toi aussi tu es en train de me faire une peur?, souffla-t-il.

Lorsqu'il comprend qu'il a été victime de ma supercherie, Marco ne perd pas une seconde. Le contact de se corps vient presque immédiatement et celui de ses lèvres presque au même instant.

- Ne refais plus ça!

Les deux baisers qui suivent me donnent l'impression que c'était une idée ingénieuse de faire croire que la situation était pire qu'elle ne l'est réellement. Technique 103 de retour extrême au calme. Je lui caresse le bras pour vraiment l'aider à se calmer.

- Je ne recommencerai pas d'ici l'accouchement. C'est une promesse.

Après, on verra si tu es sage, mouahaha !

Peut-être afin de s'aider à se calmer, il pose sa main sur mon ventre. En effet, sentir la présence de son enfant, c'est un moyen logique de se rassurer.

- Shimmer toi aussi tu es en train de me faire une peur?

Je souris, l'air très très subtilement et légèrement coupable.

- Ça commence bien, je suis en train de donner le mauvais exemple.

Je ris un peu, avant d'être arrêtée par une contraction.

- Ouais, par contre, les contractions, ce n'était pas une blague, elles sont réelles... Peut-être que le moment approche ? Enfin, c'est normal que ça approche, il ne va pas reculer, ça approche en permanence, mais tu vois ce que je veux dire... ... Je crois que j'ai peur de ne pas me rendre compte ou de ne pas sentir une douleur que je serais supposée avoir...

Cette confidence est un peu épineuse, car je ne veux pas insinuer que je suis stressée, mais je devrais peut-être l'être ?

- Je ne recommencerai pas d'ici l'accouchement. C'est une promesse.

Marco soupira, il y comptait bien. Ce n'était pas le moment de crier au loup, mais bon, il n'allait pas non plus se mettre à l'ignorer en disant ''Hah! Non tu ne m'auras pas cette fois'' si elle recommençait. À ce stade des contractions pourraient vraiment survenir. C'était une question de jours... Ou d'heures.

- Ça commence bien, je suis en train de donner le mauvais exemple.

- Oiseau de nuit, taquine... Je vais avoir des cheveux blancs avant l'âge on dirait.

Marco préférait en rire, même s'il avait l'espérence d'élever un enfant aussi sage que Tori... Quoiqu'il commençait à douter pour la comparaison, elle avait ses moments têtues sa chérie. Mais elle avait le coeur à la bonne place et ça faisait partie de son charme. Alala, c'était bien lui ça, Tori faisait une mauvaise blague et lui il retombait amoureux.

Son sourire s'effaça lorsque Tori s'arrêta de rire aussi.

- Ouais, par contre, les contractions, ce n'était pas une blague, elles sont réelles... Peut-être que le moment approche ? Enfin, c'est normal que ça approche, il ne va pas reculer, ça approche en permanence, mais tu vois ce que je veux dire... ... Je crois que j'ai peur de ne pas me rendre compte ou de ne pas sentir une douleur que je serais supposée avoir...

- Tu as peur de ne pas avoir mal? Ou que Shimmer apparaisse comme ça sans prévenir?

Et c'est comme ça qu'ils découvrent que leur enfant peut se téléporter. Pouf! Dans leur bras! Ne serait-ce pas magique comme entrée? Ça serait peut-être trop convénient et/ou inquiétant en fait. Marco sentait à nouveau la nervosité le gagner, mais là, c'était Tori qui avait besoin de lui, vraiment. Ayant un flash d'inspiration, il se leva et alla allumer la radio, leur playlist mp3 jouait tandit qu'il revenait vers sa bien-aimée.

- Vas-y doucement...

Il l'aida à se relever tranquillement, faisant glisser ses mains vers sa taille. Il l'invitait comme silencieusement à danser, comme un slow, lui faisant bouger les hanches. Un autre truc appris dans les cours.

- Si c'est le moment on sera bientôt fixé... Sinon, ça sera une autre petite soirée à nous. J'ai pas sommeil...

Son coeur battait à tout rompre, il tremblait un peu, mais pour au moins quelques minutes, il voulait essayer d'avoir l'air cool et d'être quelqu'un sur qui Tori pourrait s'appuyer.

- Tu as peur de ne pas avoir mal? Ou que Shimmer apparaisse comme ça sans prévenir?

Je ne sais pas exactement ce qu'il veut dire par " apparaître sans prévenir ", mais je prends une chance en tentant d'éclaircir mes propos :

- Les deux ? Je veux dire, oui, j'ai peur de ne pas avoir mal. J'ai peur de me rendre compte trop tard qu'elle essaie de sortir.

Marco se lève et alors que je me demande ce qu'il est en train de faire, de la musique que je connais bien se met à jouer et mon amour revient vers moi pour m'aider à me lever.

- Vas-y doucement...

- Oui...

C'est comme s'il me disait silencieusement " M'accordez-vous cette danse ? ", sauf qu'on n'est pas dans un film. Je m'appuie un peu sur lui. Je ne crois pas qu'il m'en voudras, après tout, je ne pèse pas une tonne.

- Si c'est le moment on sera bientôt fixé... Sinon, ça sera une autre petite soirée à nous. J'ai pas sommeil...

Reconnaissante, je lui souris et le serre dans mes bras.

- Tu as raison. Merci.

Et je me laisse emporter par le rythme, essayant de me concentrer sur le moment présent, plutôt que de penser à ce qui pourrait se passer au cours des heures ou des jours à venir. Je voudrais que ça n'arrive pas. Je voudrais ne pas avoir besoin de passer par cette étape. Maintenant que je commence à sentir que c'est tout proche, j'ai peur. Il me semble que j'ai oublié ce que j'ai appris et je voudrais pouvoir voir ma mère, ma sœur, mes deux grands-mères, Rosemarie et même Laetitia... Des femmes importantes que je connais, que j'ai connu et qui ont été présentes depuis ou pendant plusieurs années pour moi.

- Les deux ? Je veux dire, oui, j'ai peur de ne pas avoir mal. J'ai peur de me rendre compte trop tard qu'elle essaie de sortir.

Marco ne pouvait pas prétendre savoir ce que Tori pourrait ressentir, et ne pourrait pas l'imaginer même s'il essayait. C'était quelque chose complètement hors de sa ligue. Il avait déjà été tenté de voir sur internet à quoi ça pourrait ressembler, mais peut-être par peur de se faire surprendre comme en plein délit ou par une pudeur probablement immature, il n'avait pas osé. Mais si on en croyait le cliché cinématographique américain, Tori allait le sentir quand le moment allait venir. Il espérait qu'elle n'allait pas connaître cette douleur presque carricaturée des émissions de télé. Faut dire que le peu qu'il avait vu, c'était pas des références fiables. Marco ressentit une certaine fiertée quand Tori s'appuya sur lui. Il remonta ses bras pour la prendre dans un câlin, continuant de la faire bouger au rythme de la musique. Si ce n'était pas du fait que Shimmer commençait à prendre de la place, ce serait comme toute autre soirée de couple bien innocente, sans stresse. Mais il croyait ressentir que le coeur de Tori battait à tout rompre ou peut-être était-ce juste le sien et qu'il essayait de se rassurer en se disant qu'il n'était pas le seul à être nerveux.

Appuyant sa tête contre la sienne, il expira, se rendant compte qu'il avait comme retenu inconsciemment son souffle.

- Ça va bien se passer, je suis là... Et tu es la femme la plus forte que je connaisse..., souffla-t-il.

Il se sentit embarrassé d'avoir dit ça à voix haute et espérait vraiment ne pas avoir empiré les choses. Il se tut essayant de ne pas trop en dire et de laisser un peu Tori dans sa bulle si elle en avait besoin, restant tout de même aux aguets.

Et s'il y avait des complications ? Genre une césarienne est nécessaire. Et si je n'étais pas assez forte ? Que je n'arrivais pas à " pousser " ? Si ça dure plus de 24h ?... Je n'arrive pas à rester concentrée sur le présent. Constamment, des pensées viennent m'assaillir et j'ai l'impression d'être au bord d'un gouffre sur une toute petite île rocheuse au milieu de l'océan. Une tempête déchaîne les vagues et chaque fois que l'une d'elle approche, j'ai peur qu'elle vienne s'écraser contre la roche à ma hauteur. Si je survie à l'impact, je serai malgré tout emportée par le courant de l'eau qui se retire. Alors, j'essaie de m'accrocher, je m'accroche à Marco le plus possible. Peut-être qu'il ressent ma détresse, car en appuyant sa tête contre la mienne, il me dit :

- Ça va bien se passer, je suis là... Et tu es la femme la plus forte que je connaisse...

Entendre sa voix me fait vraiment du bien. C'est encore mieux que d'être seulement enveloppée par sa présence.

- Je t'aime.

Après quelques instants de silence et une contraction, j'ajoute :

- Je crois que c'est du sérieux... J'ai l'impression que ce n'est pas cette nuit qu'on ira se recoucher... S'il te plaît, parle-moi. Raconte-moi n'importe quoi. Le pire repas que tu as mangé dans un avion, les souvenirs que tu as de tes années de vie au Japon, l'animal le plus intelligent que tu aies vu dans une vidéo sur internet,  la fois où tu as été le plus impatient pour voir un film. N'importe quoi.

Je crois que si je l'écoute parler, ça m'empêchera de penser à toute sorte de choses anxiogènes.

Tori lui avait dit qu'elle l'aimait et Marco ignorait s'il lui avait répondu à voix haute ou dans sa tête. Il continuait de la serrer contre lui. Il se demandait si c'était elle qui s'accrochait désespérement à lui ou lui qui s'accrochait à elle. Toute la situation lui donnait le vertige, mais il continuait de se balancer au rythme de la musique. Si ça se trouve c'était une fausse alerte. Ils avaient encore une semaine ou deux devant eux, peut-être que Shimmer leur faisait un poisson d'avril, même s'ils n'étaient pas du tout dans ce mois-ci. Elle allait faire son entrée plus tard, une après midi où lui et Tori auraient tout les deux les heures recommendables de sommeil dans le corps. Ça allait se passer dans la douceur, la relaxation, et juste le bien-être total et la joie... Et Marco rêvait en couleurs. La vie n'était jamais aussi convéniente, la vie de parents encore moins et ils en avaient déjà un avant-goût. Il se surprenait même à se demander s'il était vraiment prêt. Mais non c'était pas le moment d'avoir ce genre de pensée! À neuf mois de grossesse et la naissance imminente de leur premier enfant, ce n'était pas le moment de se dire ''Ah ouais finalement, je pense que je suis pas prêt à être papa'' Surtout qu'ils voulaient tout les deux et ils-- Aaah c'était le stress qui parlait, assurément. Il ne pensait pas de manière rationnelle.

Marco n'était pas comme Tori, c'était elle qui arrivait à garder la tête froide en toutes circonstances, c'était elle la voix de la raison du couple et elle allait sans doute encore le rassurer comme à son habitude---

- Je crois que c'est du sérieux... J'ai l'impression que ce n'est pas cette nuit qu'on ira se recoucher... S'il te plaît, parle-moi. Raconte-moi n'importe quoi. Le pire repas que tu as mangé dans un avion, les souvenirs que tu as de tes années de vie au Japon, l'animal le plus intelligent que tu aies vu dans une vidéo sur internet, la fois où tu as été le plus impatient pour voir un film. N'importe quoi.

Oh.

Tout les préconçus de Marco venaient de se briser à cet instant précis. Tori elle-même était nerveuse, évidemment! C'était elle qui allait vivre vraiment cette épreuve. Si Marco se mettait lui-même à paniquer, qu'est-ce que ce serait pour elle??? Vite répondre!

- Oh euh le pire repas en avion... Je saurais même pas dire c'était quoi, ça avait l'air d'un morceau de viande nageant dans sa propre sauce, mais il était vert et la sauce était blanche et... Je crois que la seule chose qui avait l'air moindrement appétissante c'était le jus de pomme en plastique.

Ouais et raconter graphiquement un pire repas à une femme enceinte n'était pas la meilleure idée.

Changeant rapidement de sujet, Marco passa au sujet suivant.

- Je me souviens pas de beaucoup de choses du Japon avant de partir, j'étais jeune, mais à chaque année... Jusqu'à mes dix ans en tout cas, on allaient rendre visite à mes grand-parents. Ils vivaient à Osaka et mon grand-père avait son propre magasin de mochi. Je l'ai déjà vu travailler et ça avait l'air intense, mais les mochis étaient tellement bons. Je dois pas en avoir mangé souvent ou alors c'était juste parce que c'était ceux de mon grand-père, mais pour moi c'était les meilleurs mochis au monde.

Et pourquoi quand il était nerveux il parlait surtout de nourriture?!

- Pardon, j'ai pas les sujets les plus passionnants hein?

La description que Marco fait du pire repas d'avion me donne l'impression qu'il s'agit d'un conte d'halloween. Il y a sérieusement des compagnies aériennes qui servent ça ?!

- Viande... verte ??? Je préfère ne pas savoir combien de temps elle a passé dans un réfrigérateur débranché...

Et j'espère surtout que tu n'en a pas mangé, erk... Quant au Japon, je ne suis pas étonnée de voir le sujet glisser vers la nourriture. Cette tournure peu surprenante parvient à me faire sourire discrètement, mais ça passe comme un éclair, puisque mon amoureux ressent le besoin de s'excuser à propos de ce qu'il raconte :

- Pardon, j'ai pas les sujets les plus passionnants hein?

Je secoue très lentement la tête de droite à gauche.

- Non, non, ça va. Même si tu me parlais d'un après-midi de pêche ennuyeux autour d'une flaque d'eau qui a été confondue avec un étang, ce serait bien.

Parlant d'agrément, je sens que ça s'est accéléré à l'intérieur et ce n'est pas très agréable... Je me crispe un peu à cause de ce changement de rythme et décide d'en informer mon amoureux :

- Marco ? Je crois que la petite passe au niveau suivant... Il faudrait peut-être appeler Archie ?

Il me semble que c'est la 300ème fois que j'emploie les termes " je crois ", " peut-être ", " j'ai l'impression ", " je ne sais pas ", " je ne suis pas sûre "... J'ai l'impression q.. argh, tiens, encore !, j'ai l'impression de refiler des informations de sources douteuses et discutables à l'intention de TVA. Et c'est l'auditeur, Marco en l'occurrence, qui se pose des questions et qui doit se fier à l'information diffusée.

Au moins Tori n'a pas eu la nausée en entendant parler de la viande plus que douteuse... Enfin si c'était vraiment de la viande. C'était peut-être un pâté vegan pour autant que Marco le sache, ses souvenirs étant plus que douteux, mais voilà. Il préférait ne pas s'attarder sur le sujet de nourriture dégueulasse en avion, ce n'était pas le truc le plus intelligent ou romantique à décrire. Du moins, sa femme ne s'en préoccupait pas, le rassurant une nouvelle fois.

- Non, non, ça va. Même si tu me parlais d'un après-midi de pêche ennuyeux autour d'une flaque d'eau qui a été confondue avec un étang, ce serait bien.

Marco laissa échapper un petit rire en imaginant la scène, mais il retrouva vite son sérieux, sentant Tori devenir tendue. Oh oh...

- Marco ? Je crois que la petite passe au niveau suivant... Il faudrait peut-être appeler Archie ?

Il acquiesça, tentant de rester calme, il aida Tori à s'asseoir sur le lit avant de prendre le combiné et de composer le numéro du portable d'Archie.

C'est la voix endormie de son ancien professeur qui se fit attendre.

- Hellwo?

- Archie? Pardon de te réveillé à cette heure aussi tardive. C'est Tori... Je crois que le bébé arrive.

La voix du médecin se fait entendre un peu plus clairement, il lui demande aux combien de temps les contractions et à ce moment là, Marco regarde Tori d'un air un peu perdu. Il ne sait pas trop quoi dire. Ils n'avaient ni l'un ni l'autre calculé le temps.

- Vas lui préparer un bain pour qu'elle se détende et essayez de surveiller le temps, c'est possible que ce soit du faux travail. Je me prépare quand même entre temps. Le temps d'être prêt, je devrais arriver dans 30-45 minutes.

Le jeune homme resta un moment bouche-bée. Ça allait être aussi long que ça? Et si Tori perdait les eaux? Et si Archie n'arrivait pas à temps et si... et si...

- Marco, ça va bien se passer. Un accouchement peut prendre plusieurs heures, voire plusieurs jours.

Et était-ce sensé le calmer ça???

- Respirez, détendez-vous, ça va bien se passer, répéta Archie.

Il avait tellement l'air sûr de lui... Bon évidemment, il était médecin et lui-même papa, il en avait vu d'autres, il savait de quoi il parlait. Marco espérait juste ne pas être seul et que Shimmer arrive sans qu'il sache quoi faire. Après avoir traîné encore un peu au téléphone, nécessitant qu'Archie le calme, il raccrocha enfin, expliquant à Tori.

- Ça se peut encore à ce stade que ce soit une fausse alerte... Je vais te préparer un bain, mais Archie se prépare pour venir nous voir. Ça va aller.

Il aida ensuite Tori à se lever avec toute la douceur possible pour la conduire à la salle de bain.

Aussitôt dit, Marco m'aide à rejoindre le lit et à m'y assoir. Pendant qu'il prend le téléphone, je porte mes mains à mon ventre et le caresse en espérant que ce mouvement aide un peu à je ne sais pas quoi. J'écoute d'une oreille distraite la conversation ou plutôt, j'écoute les réponses de Marco, étant donné que je n'ai pas accès au reste du contenu.

Plus ça dure, plus j'ai l'impression que le visage de mon amoureux se décompose. Je crois qu'on a autant besoin l'un que l'autre d'être rassurés par la présence d'un expert en chaire et en os et non pas juste de sa voix à l'autre bout du fil. Lorsque l'appel arrive finalement à son terme, je fixe Marco, le regard rempli de questions.

- Ça se peut encore à ce stade que ce soit une fausse alerte...

Surprise, je répète :

- Une fausse alerte...

Non, je ne crois pas. Quand même pas à ce rythme de contraction ?...

- Je vais te préparer un bain, mais Archie se prépare pour venir nous voir. Ça va aller.

- D'accord.

Je me donne un petit élan et m'appuie à nouveau sur Marco qui m'aide à me lever.

Une fois dans la salle de bain, je me rassois sur le couvercle de la toilette en attendant que le bain soit prêt. C'est là que j'ai l'impression que la pièce est trop claire, froide. Il me semble que si les murs étaient bleu céruléen, ce serait plus apaisant, sans être oppressant.

Lorsque l'eau a fini de couler, je demande à Marco de m'aider à retirer mes vêtements et enfiler un haut de maillot de bain, mais je désire cependant garder mon amulette. Je remercie ensuite mon amoureux en l'embrassant.

C'était le moment où tout sembler aller au ralenti. Enfin tout sauf le bébé. L'eau ne coulait pas assez vite, Archie prenait du temps. Bon si ça se trouvait il n'était pas encore dans sa voiture ou alors il se battait pour s'habituer à la conduite à gauche. Et s'il avait un acc--- Non, Marco, ne pas penser à ça! Surtout pas. L'eau ayant enfin atteint un niveau acceptable, il ferma le robinnet et aida Tori. La pauvre, il se demandait comment elle arrivait à tenir debout, visiblement ça allait mal même si elle n'était pas au bout de ses peines. Doucement, il l'aida à s'asseoir dans le bain, répétant pour un nombre incalculable de le fois le fameux ''Ça va aller'', il commençait à avoir peur que Tori lui dise de la fermer ou de juste exprimer qu'elle en avait marre de cette phrase toute faite. Ses inquiétudes furent comme temporairement mises de côté lorsque sa femme l'embrassa pour le remercier. Ce n'était que la moindre des choses. Il se sentait tellement impuissant et inutile. Comme pour essayer de faire quelque chose, quoi que ce soit, il alla prendre un verre en plastique et entreprit de recueillir de l'eau du bain pour le lui verser le long de son dos, recommençant le processus.

- Tu me le dit si tu veux quoi que soit... Je peux te donner à boire, ou à manger ou... mettre de la musique ici... Ou je peux me taire aussi. Ce que tu veux, bredouilla-t-il d'un ton penaud.

Ses yeux se dirigeaient vers l'amulette de sa bien-aimée, faisant comme appel lui aussi aux ancêtres de Tori pour l'aider.

Il jeta un coup d'oeil à l'horloge. 3h25... Déjà? Le temps était tellement bizarre, avançant à la fois trop vite et trop lentement.

Marco frissona, il ne savait pas si c'était parce qu'il avait froid ou si c'était le stress ou la fatigue.

- La température de l'eau te convient toujours? Si tu veux sortir, dit le moi aussi.

L'eau est chaude, la température est parfaite. J'ai même droit à un extra, gracieuseté du verre en plastique. C'est agréable. Ça m'aide à me détendre un peu. Je laisse même échapper un soupir.

- Tu me le dit si tu veux quoi que soit... Je peux te donner à boire, ou à manger ou... mettre de la musique ici... Ou je peux me taire aussi. Ce que tu veux.

Est-ce que j'ai soif ? Est-ce que j'ai faim ? Non, faim, non. Je n'ai pas faim, je ne me sens pas capable d'avaler quoique ce soit. Je crois que je n'ai besoin de rien. Je secoue la tête.

- Non, ça va. Je n'ai besoin de rien pour le moment. Ta présence m'aide beaucoup.

Et je ne dis pas ça juste pour le rassurer, je le pense vraiment. Je crois que j'ai un peu peur de me retrouver seule avec moi-même en ce moment.

- La température de l'eau te convient toujours? Si tu veux sortir, dit le moi aussi.

Je sors la main de l'eau et viens prendre celle de Marco. J'essaie de lui sourire en le regardant.

- C'est parfait comme ça.

Puis une nouvelle sensation vient. C'est un peu gênant à décrire, mais je crois savoir ce que c'est. Je ne suis pas du genre à me laisser aller lorsque je suis à la piscine ou dans le bain. Je préfère sortir et aller à la toilette, mais là, il ne s'agissait pas de ça, ce n'était pas un échappement. Je n'ai pas envie de dire cette phrase, c'est trop cliché... Faut que je le fasse, pourtant... argh...

- Je crois que je perds les eaux... Argh, ça sonne cliché !!!

C'est sorti tout seul, je n'ai pas pu m'en empêcher. J'espère qu'Archie n'est plus très loin. Combien de temps ça fait ?

- Non, ça va. Je n'ai besoin de rien pour le moment. Ta présence m'aide beaucoup.

Même dans des situations comme ça, Tori pensait toujours à lui en premier, ça en était gênant. Mais il n'était pas d'humeur à essayer de la contredire. Il se sentait rassuré quand elle lui prit la main, lui disant que tout était parfait comme ça. Encore là, c'était plutôt à lui de la rassurer. Rougissant un peu, il lui serra tendrement la main.

- Je n'irai nul part, je suis là...

Bon c'était peut-être cliché et évident comme phrase, mais là, il ne savait pas quoi faire pour combler le silence. Soudainement, c'est Tori qui parla.

- Je crois que je perds les eaux... Argh, ça sonne cliché !!!

Marco aurait presque voulu rire. Non c'était pas cliché! C'était le déroulement naturel des choses, c'est comme dire ''Hey, je vois la tête du bébé! Ah non trop cliché, on devrait voir les pieds à la place'' ...Ah pourvu que ça n'arrive pas comme ça!

- M-Mais non! C'est normal! Tu tiens le coup? Respire!

Argh! Il voulait se gifler mentalement.

- Tu veux sortir du bain ou juste rester là?

Il ne savait tellement pas quoi faire ou quoi dire. Où était Archie??? Si Tori lui disait qu'elle commençait à pousser ensuite, il allait perdre connaissance... Urgh, il était pitoyable. Zéro fiabilité. Est-ce que quelqu'un cognait à la porte à cette heure-ci? La voisine qui trouvait que Tori faisait trop de bruit? BAH EXCUSE, SI MA FEMME ACCOUCHE. ...Oh wait, la voisine travaille de nuit. Et c'était plus logique que ce soit Archie. OH ARCHIE!

- Entre!, appela Marco.

...Oh. Porte verrouillée. GÉNIAL.

Embarrassé, il se tourna vers Tori.

- Je vais ouvrir la porte, je reviens tout de suite!

Il manqua presque de se prendre les pieds dans le tapis de la salle de bain dans sa course, mais il parvint à se rendre à la porte sans que son visage rencontre le plancher d'abord.

- Archie! Entre! Vite, elle a perdu les eaux!

- Tout doux Marco... C'est signe que le travail a commencé, mais ça peut prendre plusieurs heures encore...

Le médecin, emmena un sac assez imposant. Marco ne pouvait pas imaginer ce que c'était, mais il ne posa pas de questions, bredouillant à la place des excuses pour avoir pressé Archie ainsi. Ce dernier secoua la tête, il avait emmené des cafés du Starbucks, dont un pour Marco.

- Tu vas en avoir besoin.

- J'ai pas soif pour le moment, mais merci...

Il alla poser les cafés sur la table avant de revenir vers sa femme.

- Il est là. Alors... Qu'est-ce qu'on fait?

Marco ne savait ni quoi faire ni ou se mettre, mais il savait qu'il ne pouvait pas rester à rien faire.

- M-Mais non! C'est normal! Tu tiens le coup? Respire!

- Oui oui, c'est moins douloureux que dans les films. Ça va comme ça pourrait aller...

Cette dernière phrase ne voulait rien dire...

- Tu veux sortir du bain ou juste rester là?

- Rester là. Je... j'ai l'impression que c'est plus simple dans l'eau.

- Entre!

- Hein ?

Je mets un moment avant de comprendre que Marco ne s'adresse pas à moi. Ça a cogné ? Je n'ai même pas entendu quoique ce soit... Cependant, rien ne semble se passer.

- Je vais ouvrir la porte, je reviens tout de suite!

Et c'est la seconde fois en l'espace de 30 secondes que je comprends en retard ce qu'il se passe. Ah, oui. La porte était barrée... Je me mords la lèvre inférieure lorsque mon amoureux manque de tomber en s'enfargeant dans le tapis et je ne peux m'empêcher de dire :

- Ce n'est pas parce que le docteur arrive que tu as le droit de m'imiter et de te blesser en trébuchant !

J'écoute un peu ce qu'il se dit en-dehors de la salle de bain, mais je n'entends pas tout. Lorsque Marco revient, j'en profite pour saluer de loin le nouvel arrivant.

- Salut, Archie. Bienvenue dans notre illustre salle de bain qui pique les yeux, pour le coup.

Et suite à la question de Marco, à savoir " qu'est-ce qu'on fait ? ", j'hausse les épaules, m'apprêtant à dire la première bêtise qui me passe par la tête :

- Strip poker, quelqu'un ?...

Mais c'est que j'enchaîne les blagues. Et c'est reparti pour un one man show ! Et je dirais même plus : un woman shadow ! Shadow ou shadow show, les deux sonnent bien.

- Umh, pardon. Je crois que l'humour m'aide à faire passer la douleur.

- Salut, Archie. Bienvenue dans notre illustre salle de bain qui pique les yeux, pour le coup.

Archie arrivait avec son sac, le posant dans un coin, faisant un petit signe de main.

- Oh ne t'inquiète pas pour ça, je ne viens pas critiquer la décoration.

Marco remarqua qu'il fallait vraiment porter attention à ce qu'Archie disait. Il parlait très doucement et semblait être le portrait de la sérénité. Un bouddha version britannique! De son sac, le médecin sortit un oreiller, visiblement de meilleure qualité que celui de leur appartement, Marco se sentait un peu coupable de ne pas avoir pris quelque chose de mieux. Il regarda quelque peu malaisé Archie qui plaçait l'oreiller derrière la tête de Tori. Cette dernière enchaînait les blagues et encore une fois Marco était trop nerveux pour vraiment participer. Il se mordit la lèvre inférieure en baissant la tête, se sentant quelque peu coupable d'ailleurs.

- Je vois que ton humour est toujours indestructible Tori, souria Archie, avant de s'écarter un peu.

La salle de bain n'était pas des plus spacieuses, il voulait éviter d'être trop envahissant pour le couple. Certes, un médecin était toujours nécessaire sur place, mais tant que les choses restaient ainsi, mieux valait laisser la nature faire et intervenir qu'en cas de nécessité.

- Je vais juste changer l'eau un peu alors..., bredouilla Marco.

Il préférait que Tori aie de l'eau bien propre, même si ça ne donnerait pas grand chose au final. Il s'assura de verser de l'eau chaude fraichement sortie du robinet sur elle alors que le bain se remplissait de nouveau, juste pour pas qu'elle n'ait froid.
Les contractions semblaient aller et venir, Marco était trop préoccuper pour les calculer, il se contentait de tenir les mains de Tori au point que ses propres jointures devenaient blanches.

- P-Pardon..., souffla-t-il.

C'était long... Il savait bien que le bébé arriverait selon son propre temps, mais il craignait toujours que ça prenne trop de temps, que ce soit alarmant et que--- Un regard vers Archie indiquait que c'était normal. Il prenait son reste de café au calme, se levant ensuite avec un petit appareil qu'il appuya légèrement contre le ventre de Tori.

- C'est pour entendre les battements de coeur du bébé, avait expliqué Archie.

Après quelques secondes, il adressa un sourire, indiquant que tout allait bien.

Échangeant comme de place avec Marco (il se déplaça juste de quelques pas sur la droite pour faire de la place à Archie), ce dernier se pencha vers Tori, appuyant sur les points de pressions dans son dos pour aider à la soulager. Marco ne put s'empêcher de penser que ce serait une technique bien pratique à apprendre.

- Je vois que ton humour est toujours indestructible Tori.

Oh, ça, oui. Heroes never die ! L'oreiller que me passe le docteur est confortable. Plus que ceux du logement. Ahhh, là ! Là, on parle d'oreiller !

- Je vais juste changer l'eau un peu alors...

Pauvre Marco, je sens qu'il veut se rendre utile au lieu de rester planté là à ne rien faire. Je serais pareille si j'étais à sa place dans une situation semblable. Je le laisse faire, mais culpabilise un peu, parce que j'ai l'impression d'être un animal dont il faut prendre soin car il ne peut pas le faire par lui-même. J'ai alors une pensée pour Jake qui est resté de l'autre côté de l'océan. Je fais confiance à notre voisine, July. Elle doit bien s'en occuper, je n'ai pas de doute là-dessus, mais j'espère qu'il ne se sent pas à nouveau délaissé... Se faire abandonner une fois par son propriétaire c'est quelque chose, alors deux fois...

Une fois que le bain est à nouveau rempli, je demande à Marco de me prendre les mains pour m'aider. Ça me permet de ressentir un certain soutien, en plus de donner quelque chose à faire à mon amoureux pour qu'il se sente utile et pour calmer son stress.

Après un long moment, je remarque que les jointures de Marco pâlissent. Je lui souffle :

- Attention à ne pas t'abîmer les jointures. Tu ferais mieux de prendre une pause.

C'est alors qu'Archie en profite pour s'approcher avec un petit appareil qu'il vient mettre en contacte avec mon ventre. Il explique que c'est pour entendre les battements de cœur du bébé et je me fige alors, n'osant plus bouger même si on ne m'a pas demandé de rester immobile. C'est toujours un peu comme ça lorsqu'on est examiné, que ce soit pour la bouche, les oreilles, la pression, les battements de cœur ou même la respiration. On n'ose pas trop bouger pour ne pas nuire à l'examinateur. Finalement, il sourit et je comprends que c'est pour dire que tout est normal, alors je laisse sortir un soupir, comme si j'avais retenu mon souffle. Cependant, ça ne semble pas être terminé, puisqu'il se déplace et- Ouch !

- Agh ! Caliss...

Okay, les points de pression du dos... Au début ça fait mal, mais par la suite c'est soulageant. Je ne m'y attendais pas. Je vais espérer que le sacre se soit perdu dans les méandres de l'incompréhension du français aux oreilles des anglophones... Pour Archie, très probablement, mais Marco, je suis Un peu moins certaine.

- Attention à ne pas t'abîmer les jointures. Tu ferais mieux de prendre une pause.

Tori ne commentait même pas sur la possibilité qu'il ait put lui faire mal, s'inquiétant surtout pour lui.

- Ce n'est pas à moi de prendre une pause, c'est toi qui...

Il ne voulait pas lui rappeller que c'était elle qui souffrait, encore une fois ce serait comme nommer l'évidence. Et il ne voulait pas non plus sortir le cliché de ''C'est de ma faute, c'est moi qui t'a fait ça'' pendant que Tori était dans ses douleurs. Ouais, il collectionnait les stéréotypes dans sa tête, c'était pas possible. Marco grimaça en entendant sa femme jurer.... Du moins il lui semblait reconnaître le juron, depuis le temps. Archie ça lui passait dix pieds par dessus la tête alors qu'il continuait de masser.

- Elle devrait pas genre... pousser?, murmura Marco, même s'il savait pertinemment que Tori l'entendait quand même.

Ils étaient trois dans la même salle de bain, ça commençait à faire bondé un peu.

- À ce stade-ci, ça l'épuiserait pour rien. Elle peut essayer de temps en temps, mais pas se forcer. Tori si tu veux changer de position ou te déplacer, hésite pas.

Marco acquiesça un peu, se retrouvant encore au moment malaisant de ne pas savoir quoi faire. Après quelques minutes, Archie s'était éloigné à nouveau pour leur laisser de l'espace, chose que le jeune homme asiatique appréciait sans vraiment oser l'exprimer à voix haute. Il tenait les mains de Tori, les caressant un peu entre les siennes. À force d'être accroupi, Marco ne sentait plus ses genoux, mais il s'en fichait.

- C'est idiot de ma part, mais j'aimerais bien que Katheryne soit là..., marmonna Marco.

Pas bonne idée. De un, la salle de bain n'allait pas contenir quatre personnes sans que quelqu'un se marche sur les pieds et ensuite ce serait pas bon pour Katheryne considérant son pouvoir de ressentir la douleur. N'empêche, Marco ne pouvait s'empêcher de penser que la présence de la mère de Tori serait rassurante et probablement plus utile que la boule de stress qu'il était.

- Elle devrait pas genre... pousser?

Cette question de Marco vient m'embêter. Ce n'est pas la question en elle-même qui est frustrante, mais plutôt le fait que je voudrais que ce soit aussi simple, cependant je n'ai pas l'impression d'en être rendue là. Comme de fait, Archie confirme que le moment n'est pas encore venu.

- À ce stade-ci, ça l'épuiserait pour rien. Elle peut essayer de temps en temps, mais pas se forcer. Tori si tu veux changer de position ou te déplacer, hésite pas.

- D'accord...

Ça me décourage, parce que même en ne sentant pas que c'est le temps de pousser, j'aurais voulu l'entendre dire " Mais où avais-je la tête ? Oui, en effet, ce serait préférable que tu essaie de pousser, Tori. " Pffft...

Marco vient me reprendre les mains et j'essaie de " pousser " un peu par moments en me disant que ça peut peut-être possiblement aider un tout petit peu à faire avancer le travail. Ça fait beaucoup de peu(t)...

- C'est idiot de ma part, mais j'aimerais bien que Katheryne soit là...

Je redresse la tête pour le regarder. Je ne trouve pas que cette remarque est idiote. Moi aussi je voudrais qu'elle soit là. Je voudrais qu'elle puisse me soutenir, puis je me dis que la technologie existe pour ce genre de situation. À défaut d'avoir sa présence, je pourrais au moins entendre sa voix.

- Le sentiment est partagé, alors. Moi aussi, je voudrais qu'elle puisse être là. Mais, les téléphones n'existent pas pour rien et Skype non plus. Ce serait possible de lui passer un appel, non ?

Peut-être d'abord par téléphone, parce que je doute que l'ordinateur puisse réveiller qui que ce soit à l'heure qu'il est. Il doit être fermé et ce n'est certainement pas un appel Skype qui l'allumera comme par magie.

Marco se mordit encore une fois la lèvre inférieure en voyant Tori commencer à se forcer pour faire avancer les choses. Il ne pouvait s'empêcher de penser que ÇA c'était de sa faute. Sa question était complètement débile... Au moins, il se consolait en se disant que sa femme n'avait pas l'air frustrée contre lui précisément, du moins ça en avait pas l'air. Urgh, il se demandait si une césarienne c'était si pire que ça finalement, Tori n'aurait pas à endurer toute cette année. Mais euh, l'image d'elle qui se fait ouvrir le ventre lui donna un vertige. Okay, non! Dans un cas comme un autre l'image était pas du tout rassurante! Se concentrant sur le moment présent, il décida de ne pas partager cette pensée à voix haute. En tout cas, Tori ne réagit pas négativement à la mention de sa mère, au contraire.

- Le sentiment est partagé, alors. Moi aussi, je voudrais qu'elle puisse être là. Mais, les téléphones n'existent pas pour rien et Skype non plus. Ce serait possible de lui passer un appel, non ?

- Ah oui tu as raison! Je vais faire ça... Euhh...

- Je peux chercher le téléphone, lui dit Archie avant de sortir.

Lui indiquant où le trouver, Marco attendit quelques secondes avant que son ancien professeur le lui apporte.

C'était peut-être ridicule de sa part, mais il préférait ne plus s'éloigner de Tori pendant un moment.

Sans même réfléchir à l'heure qu'il était, Marco composa le numéro et attendit. Il sentit un poids peser dans son estomac lorsqu'il entendit la voix fatiguée de John.

''Allo?''

''H-Hello c'est Marco...Euh pardon de déranger, mais euh, le travail a commencé. Je veux dire, Tori a perdu les eaux et et... euh... Je peux parler à Katheryne?''

Marco avait l'impression de devoir parler sans prendre de pauses de peur que... Il en savait rien en fait, c'était toujours malaisant de parler à John, encore plus quand il était... 4 heures du matin. Ouch. Pendant quelques secondes, il y a un lourd silence comme si le père de Tori cherchait à processer l'information.

" Euh, oui ! Oui, je vais la chercher ! "

S'en suivit quelques bruits de fond, principalement en Français pour le peu que Marco peut en entendre, ce n'est qu'après qu'il entendit la voix de Katheryne.

" Oui, Marco ? "

- Oui! Euh, John t'a expliqué? Euh, je crois que ça ferait plaisir à Tori de te parler.

Sans en dire plus il tendit le téléphone à sa femme.

- Tiens, ta mère.

Non, le téléphone! Argh, voilà que les répliques très... Torienne venaient toutes seules!